La première campagne d'Uncle
sur le
Porte-Hélicoptères "JEANNE D'ARC" - R97


jeanne 2

La Campagne 1967 - 1968...>

cliquez sur la carte pour agrandir l'image et rendre les escales lisibles !!!

A ce moment de ma vie, je m'apprête à découvrir le Monde ! Même si pour moi c'est fantastique, je n'oublie pas que plus de 45 années séparent l'instant que j'évoque du temps présent ...
Internet, l'informatique, les transports aérien ont modifié notre environnement spatial. Aussi, me contenterai-je d'anecdotes personnelles sur nos escales afin de ne pas trahir mes souvenirs et peut-être les votres par rapport à ces lieux qvers lesquels je navigue.
Dans les années concernées par mon récit, ces "campagnes" étaient pour nous , marins, des découvertes alors qu'aujourd'hui ce sont des voyages d'une banamlité déconcertante...

Mardi 31 octobre 1967 : Appareillage de Brest pour la quatrième campagne d'application du PH "Jeanne d'Arc"...
mon rêve se concrètise !!!

"Rappelle-toi Barbara
Il pleuvait sans cesse sur Brest ce jour-là "

Il fait froid, il fait gris il crachine, c'est un temps d'automne Breton qui sert de décor à notre départ.
Pour une fois je suis content d'être de corvée à la plonge ! Certes je ne vois rien de la foule des parents, amis, épouses, petites amies massés sur le quai, mais j'échappe au "passage en revue" d'un détachement de l'équipage par le Capitaine de Vaisseau GELINET Commandant de la "Jeanne" et Monsieur Pierre MESSMER alors Ministre des Armées.
L'allocution du Ministre sera suivie d'un coktail, puis les VIP vont quitter le bord. Le bruit des moteurs se fait plus puissant, un léger frémissement : on vient de larguer les amarres.
J'essuie machinalement les verres, je rêvasse, je suis déjà à Dakar notre première escale, je suis un vrai marin !! Retour brutal à la réalité le bercement vient brutalement de se transformer en une succession de "dos d'ânes", on roule, on tangue, j'ai juste le temps de rattraper un "rack" de verres avant qu'ils ne s'écrase à terre.Neptune nous souhaite la bienvenue, nous ne sommes pas encore sorti du "goulet" (1) que nous prenons une "branlée" (2) comme seule la mer d'Iroise sait les concocter en cette saison. Ce n'est pas une tempête, juste un bon coup de vent !!!
Mon amarinage commence vraiment, je n'ai qu'une hâte retrouver ma banette. Je suis mal, oui j'ai le mal de mer, mais je ne suis pas le seul alors je pense à mes copains qui sont sur le "Schoelcher" eux non plus ne doivent pas être au top de leur forme !
Une boulle au ventre, des nausées ne m'empêchent pas de me trainer, c'est bien le terme, jusqu'à la cafét'.
"Si t'es malade, force toi à manger". C'est pour essayer d'appliquer ce conseil d'un ancien que je suis aux "rationnaires". Nous ne sommes pas nombreux et sur les tables on voit quelques plateaux laissés là par leurs propriétaires, hyper pressés d'aller visiter les poulaines(3). Je m'efforce à tenir le coup , bien m'en prends, manger me fait le plus grand bien, encore fallait-il pouvoir le faire ! C'est donc un peu plus vaillant, qu'à midi je vais prendre mon premier "quart à la mer" au CO...
c'est par une mer formée que La Jeanne et le Schoelcher font maintenant route vers Dakar, qu'ils atteindront le 8 novembre 1967.

En mer, mon quotidien de détecteur ...

Pour le commun des mortels, terrien de surcroit, naviguer entre la France et le Sénégal relève de la croisière d'agrément...Jusqu'à aujourd'hui, je faisais partie de ces gens là!
J'ai vite déchanté pour deux raisons: la première, tous les marins vous le diront, est que le golf de Gascogne devient, à partir de novembre l'un des coins du globe où la navigation est des plus délicate car les dépressions qui se succèdent engendrant vents forts et grosse mer... La seconde plus prosaïque est que "La Jeanne" est un navire de combat et l'école d'application des élèves de Naval ... Notre campagne n'a rien d'une navigation de plaisance, c'est l'accomplissement de notre métier, jour après jour jusqu'à l'escale.
Lorsque je ne suis pas de quart, ma journée se déroule suivant un horaire immuable :
7h : branlebas annoncée par la sonnerie du clairon via la sonorisation du bord. On passe alors à l'éclairage intérieur normal.
7h - 8h : Toilette et petit déjeuner
8h - 9h : poste de lavage
9h - 12h :travaux quotidiens propres au service détection (maintenance du matériel et des locaux etc) corvées ou formation diverses , sans oublier les exercices liés à notre fonction d'école d'application et de navire de combat.
12h - 15h : déjeuner et repos
15h - 18h : poste de travail
18h - 20h : repos et diner
20h -22h : détente loisirs... A 22h, extinction des feux, l'éclairage intérieur passe en mode masqué avec des luminaires de couleur rouge, moins visibles depuis l'extérieur.

de Brest à Dakar,...Huit jours en mer pour atteindre l'Afrique Noire !!!

Emmitouflé dans mon blouson de mer, le casque sur les oreilles j'assure mon premier quart au C.O.
Commencer par un 12 -14 c'est bien, sauf qu'il va falloir enchainer par un 20-24 ... c'est à dire que je ne rejoindrai ma banette (4) que vers 1h du matin, après un passage à la cafet' pour discuter un peu avec les copains devant un quart de rouge et quelques sardines à l'huile (c'est le B.A. BA de l'amarinage!) alors que je suis épuisé par ma première journée de mer !!!
A preuve, je ne garde aucun souvenir de l'appontage des 4 HSS (Sikorsky S-58) de la 32 F venus de Lanvéoc-Poulmic rejoindre les 2 Alouettes III de la 22 S déjà à bord lors de l'appareillage...
Les jours vont se succèder au rythme des quarts et des exercices, peu à peu la température extérieure augmente, une belle lumière remplace la grisaille sur une mer qui se calme; c'est le bonheur à l'état pur...
Au matin du neuvième jour, les contours d'une côte se dessinent sur les écrans radar, puis elle devient visible à l'oeil nu, enfin quelques heures plus tard je suis à mon poste de manoeuvre sur la plage avant ...Le temps ne m'a jamais paru aussi long qu'aujourd'hui.. Enfin nous accostons...:

A cet instant de mon récit, je me dois d'y introduire une dimension temporelle supplémentaire :

Les préludes à l'escale et les premières heures à quai...

les deux jours qui précèdent l'escale transforment le bord: il y règne une activité fébrile qui ne se démentira pas au fil du temps.
Si la mer est calme et le temps ensoleillé, le plus tôt possible, l'officier de détail va inspecter le bateau depuis les airs à bord d'un des hélicos (c'est un exercice comme un autre!) et, systèmatiquement dès son retour une note de service tombe au bureau DET : une corvée de peinture est requise, pour la remise en etat, partielle, de la coque qui sera visible depuis la terre !!! Tribord ou babord en fonction de notre amarrage à quai.

les joies de la "corvée de coque" (en mer ou à quai suivant la météo) et autre servitude.

Nouvel embarqué je suis désigné d'office pour la première corvée de ce type; deux anciens sont la aussi pour gérer "la chaise de calfat"(5), trois ou quatre trio côte à côte, en fonction de la surface à peindre.
Nous, les bizuts, pinceau et moque en main prenons place sur les chaises que les anciens font descendre le long de la coque que nous peignons devant nous au passage... L'affaire s'est corsée lorsque nous sommes arrivés au plus bas de notre chantier: Au moment où nous demandons à hisser nous nous rendons compte que nous allons essuyer des pieds et des genoux la peinture que nous venons d'étaler sous les quolibets des anciens !!! Leçon recue, retenue et bien enregistrée.
Pour repeindre, il faut descendre au maximum et peindre en se déhanchant pour que la peinture fraiche soit au dessous de la ligne des pieds, au fur à mesure que l'on hisse la chaise !!! C'est simple non !
A quai c'est moins complexe mais plus fatiguant et tout aussi débilitant : debout sur des radeaux coincés entre le quai et la coque, les peintres sont armés de rouleaux fixés à de longues, longues perches et jouent "les schadocks".
Inutile de vous décrire le balais de ces perches qui s'entrechoquent lorsqu'il faut tremper les rouleaux dans les bacs à peinture et les redresser en arrosant les copains au passage...
Las de ce cirque un jour j'eus la "maladresse" de faire tomber un rouleau à l'eau. Il a coulé illico presto sous les yeux attérés de l'officier de détail qui dans la foulée m'a collé un rapport pour "destruction volontaire de matériel appartenant à l'état"... je fus consigné à bord pour toute la durée de l'escale que j'ai vue avec des jumelles en bois(6)... C'est beau la hiérarchie et l'autorité!!!

Si vous ne perdez pas de vue le fait que "La Jeanne", outre son rôle d'école d'application pour midships, est aussi une ambassade française itinérante, vous comprendrez qu'à chacune des escales de notre circumnavigation le commandant, va devoir assumer les obligations de représentation liées à sa fonction "d'ambassadeur".
Par voie de conséquence, outre la corvée de peinture mentionnée ci dessus, il faut monter un velum (7) sur le pont d'envol, afin d'abriter les réceptions officielles et, à bord comme à terre l'équipage, les officiers, les élèves doivent avoir une tenue vestimentaire et un comportement irréprochables !!!
Pour l'esprit frondeur d'un marin,c'est de la théorie... L'adage populaire "pas vu, pas pris" va trouver toute sa dimension lors des escales à venir, et les accrocs à la règle seront nombreux hors "inspection des permissionnaires" ou de certaines obligations ponctuelles.

Le rythme immuable des premieres heures à quai (quelque soit l'escale)!

- le Commandant est le premier à quitter le bord si tôt la coupée mise en place. Il doit rencontrer l'ambassadeur ou le consul ainsi que les autorités militaire du pays hôte.
-Suivront, peu après, le commissaire(8) accompagné de son fourrier(9) et du vaguemestre(10). Le retour de ces derniers, quelques heures plus tard, est suivi de deux annonces sur la diffusion génerale : "Ouverture du bureau de change" et "distribution du courrier aux secrétaires de services".
Encore quelques longues minutes de patience et nous allons pouvoir ouvrir les lettres tant attendues, puis ce sera la ruée vers "la banque" et la coopérative: L'escale vient vraiment de débuter.

ESCALES ET EVENEMENTS MARQUANTS

Les paragraphes qui vont suivre sont tous riches en anecdotes : une campagne autour d du monde, ça laisse des traces dans la mémoire d'un jeune Vosgien...

Dakar
(08/11/1967 - 13/11/1967)

Dès aujourd'hui et pour la durée de l'escale, nous adoptons le "régime colonial"(11) pour ce qui concerne le rythme de vie à bord !!! C'est donc en début d'après midi que retentit "permissionnaires à l'appel".
J'ai la chance de faire partie de cette première bordée.
L'inpection des permissionnaires assortie de quelques conseils "prophylactiques" à l'usage de la bleusaille (dont je suis) qui va découvrir l'Afrique et c'est le départ vers l'inconnu. Au pied de la coupée, une nuée de chauffeurs de taxis se rue littéralement sur nous pour nous faire découvrir ce qu'ils pensent être notre centre d'intérêt, à savoir le "quartier chaud" de Dakar.
Guy, Patrick et moi, ayant bien étudié la "NPV" (12), nous voilà partis, à pieds à l'assaut de DAKAR, bien décidés à "tout voir"! C'est beau la naïveté!!!
Notre contact avec l'afrique est plutôt rude :
nous découvrons la mendicité. Les mendiants sont innombrables, de tous sexes et de tous âges . Des vieux lépreux aux pauvres enfants exploités par les marabouts sans foi ni loi, nous sommes sans cesse sollicitée par de pauvres gens sans ressources, et des enfants collant comme des mouches.
Choqués mais non traumatisés, nous nous frayons un chemin pour arriver au * Marché Kermel :
Cet ensemble situé en plein coeur de l'ancien quartier colonial, se compose du marché Sandaga (un bâtiment colonial formé de plusieurs niveaux) et du marché Tilène, en plein air avec son lot de produits alimentaires aux odeurs capiteuses.
Nous sommes sûr de ne pas rêver, nous sommes au coeur de la vie africaine et Sénégalaise. Nous découvrons une pratique etranges : les vendeurs qui veulent nous entraîner dans leur boutique, d'abord surpris nous nous rendons compte qu'un "non" gentiment prononcé avec le sourire suffit pour être tranquille.
Cette ambiance nous séduit alors nous hélons un taxi pour rallier le * Marché de Soumbédioune :
S'il n'est pas le premier marché aux poissons du Sénégal, le marché aux poissons de Dakar offre avec l'arrivée des pêcheurs un spectacle qui vaut à lui seul le déplacement.Les charrettes tirent alors la manne de la pêche des pirogues jusqu'aux étals, et la mise à prix commence. Les odeurs aussi ! Négociation directe entre fournisseur et consommateur...Quel spectacle, nous sommes fascinés par toutes ces découvertes et désireux de poursuivre notre initiation, nous arpentons * Le village artisanal de Soumbédioune :
Situé en bordure de la plage de Soumbédioune, le village d’art offre une panoplie de tissus africains, des tableaux, des fétiches, des masques et plein d’autres objetsdont je ne soupçonnais même pas l'existence !! J'en prend plein les yeux, un vrai bonheur et l'occasion de négocier les premiers souvenirs de notre campagne et de vérifier que nous avons bien assimilé les règles du "sport local" : le marchandage !
Examen réussi, nous ne sommes pas comme ces touristes allemands ou anglais qui paient cash au prix fort !
Il est maintenant l'heure d'un bref retour à bord pour y déposer nos "achats" et c'est le retour en ville, un p'tit resto local et ce sera notre première "corvée de charbon" (expression non traduite par votre serviteur, mais que connaissent les marins ayant "fait" l'Afrique noire !)..
Ainsi se termine la première journée d'escale de ma nouvelle vie...
les jours suivants, hors de Dakar vont m'enmener successivement sur * l'ile de Gorée :
Lieu unique, cette petite île du Sénégal, avec sa « Maison des esclaves », me fait prendre conscience de la réalité tragique de ce qui n'était alors pour moi qu'une peripétie dans mes cours d'Histoire :la traite des noirs. Bouleversant.
Beaucoup plus gaie mais tout aussi enrichissante fut la visite de * Kayar :
Le haut lieu de la pêche artisanale du Sénégal. Tous les jours, des centaines de pirogues se jettent dans l'écume de la barre, véritable muraille liquide entre l'océan et la plage.
Peu avant l'obstacle, les pirogues ralentissent, puis accèlèrent de toute la puissance de leurs moteurs pour franchir ce passage délicat et très dangereux avant d'arriver sur la plage. Là, c'est l'effervescence. Les porteurs accourent vers les pirogues (ils sont payés au poids) pour décharger le poisson dont une partie est négociée avec les particuliers directement sur le sable.
Les pirogues sont construites sur place de manière artisanale. Ces pirogues arquées, aux flancs bariolées sont de tailles différentes suivant le type de pêche pour laquelle elles sont construites. Mais elles portent toutes un "gris-gris" censé protéger les marins au cours de leurs sorties.
C'est déjà la fin de l'Escale, manoeuvres de départ nous larguons les amarres... Au revoir Dakar, mon regard est maintenant tourné vers notre futur :

Abidjan (17/11/1967 - 22/11/1967)

A l'escale d'Abidjan , sont indéfectiblement attachés les noms de Cocody et de Treichville.
le premier Cocody est une commune du département d'Abidjan située dans Abidjan nord. Commune résidentielle, cet espace est connu pour la richesse de ses habitants et l'architecture de ses maisons dont de nombreuses sont construites dans un style dit « colonial ». Les classes les plus aisées de la société ivoirienne, autant que la plupart des expatriés et des diplomates en ont fait leur résidence de choix, ce qui en fait le point de chute des officiers et des midships donc quasiment interdit aux marins que nous sommes.
le second, Treichville est une commune d'Abidjan, en Côte d'Ivoire. Elle est réputée pour être l'un des quartiers les plus animés de la ville, surtout la nuit, notamment autour du carrefour France-Amérique. Les rues ne portent pas de nom mais elles sont numérotées de 1 à 25, un paradis pour matelots en goguette, où je me suis " volontairement égaré" plus d'une fois lors de notre escale , l'exact contraire de Cocody où je n'ai jamais mis les pieds.
Comme à Dakar, je me suis promené sur les marchés (photos 1 & 2) et je suis allé en "excursion" jusqu'à Ayamé village connu pour son lac artificiel (photo 3) de 197 km2 2, réalisé en 1959 sur la rivière Bia, mais surtout pour son barrage hydroélectrique d'Ayamé 1, construit sur la rivière Bia, inauguré en 1959.
Peu avant l'appareillage, quelle n'est pas notre surprise de voir un civil franchir la coupée et reçu par le Pacha en personne... Aussitôt branché sur "radio coursives",je cherche à savoir de qui il s'agit...

n.d.l.a. (Note De L'Auteur)

Les souvenir s'estompent, parfois disparaissent. Malgré de nombreuses recherches, il m'a été impossible de savoir si ce passager était A. Castellot ou A. Decaux.
Aussi je fais appel à vous pour éclairer mon fanal (on ne parle pas de lanterne dans la marine !) cela me rendrait un grand service et rétablirai une vérité historique que j'ai peut être mise à mal en choisissant André Castellot pour la suite ...
Je vous remercie de votre compréhension.

Un V.I.P. en croisière ...

André Castellot se rend donc à Sainte-Hélène notre prochaine escale... Aux frais de la princesse !!!
Je suis rebelle dans l'ame alors cette traversée va vite devenir insupportable!
Comme il se doit pour un hôte de marque, notre homme est accueilli dans les appartements privés du commandant. Jusque là rien à redire, mais lorsqu'à longueur d'après midi, on privatise le pont d'envol pour que M. Castellot et le commandant Gelinet sirotent coktails et autres alcools vautrés sur des transats en écoutant des marches napoléoniennes jouées par l'orchestre de Maître Affilé, alors que l'équipage est soumis à des restrictions de circulation sur le bord, la colère monte en moi... Assez vite reffrénée: nous sommes en mer, je suis un "homme d'équipage" soumis à sa hiérarchie... Et les jours passent.
Peu à peu l'excitation de la découverte remplace l'amertume qui m'avait envahi... Je vais mettre pied a terre sur le sol de Sainte - Hélène comme le fit Napoléon.
une fois le navire au mouillage(13) et les barcasses etablies pour un va et vient entre le bord et le môle(14) du petit port....
Un rebondissement inattendu !!!
Comme je vous l'ai raconté précèdement un historien célèbre a profité de l'aubaine "Jeanne d'Arc" pour se rendre à Sainte Hélène. Cet odieux personnage m'est devenu franchement antiphatique pour le reste de mon existence lorsque j'ai appris que durant cette traversé il avait, quotidiennement, faxé ou télexé un papier au journal "France-Soir" sur la vie bord vue de sa dunette (15).
Je vous affirme qu'à la lecture de ces chroniques, il apparait que les hommes d'équipage ne sont que des gens incultes et ignards.
Pour argumenter mon propos, de mémoire, je cite un extrait, de cette prose indigne et lamentable: "lors du passage de l'équateur on avait soigneusement caché à l'équipage l'existence de l'effet Coriolis(16) afin d'éviter un gachi de l'eau du bord ...".
Merci cher Grand Homme, paix à ton âme.

Sainte - Hélène (27/11/1967 - 29/11/1967)

saint-hélène, petite île ...
...Mais grand escalier : La Jacob's Ladder (17)!!!


Une fois que l'indésirable eut quitté le bord, il fut oublié, moi comme les autres souhaitant avant toute chose profiter de l'escale. Sainte - Hélène ne me décevra pas !!!
C'est tout d'abord ma première escale au mouillage !
Une fois passée l'inspection des permissionnaires il faut patienter afin de prendre place à bord de l'une des chaloupes qui assurent la rotation, ce n'est pas long car elles ont une grande contenance... surtout lorsqu'on est debout !!! Une fois sur la terre ferme, allons à l'essentiel : une bonne decouverte commence toujours par celle d'un bar. Un rapide coup d'oeil semi circulaire confirme notre impression première :
mis à part quelques entrepots et engins de levage, rien ! une seule issue s'offre à nous cet escalier monumental qui nous tend ses rampes.
qu'est ce que 700 marches pour des marins assoiffés ! Stimulés par la soif , de la découverte bien entendu, nous gravisons la falaise et là, devant nos yeux equarquillés une petite ville improbable : JAMESTOWN. Quel coup de massue , sur la porte du pub situé juste en face de nous une pancarte : " désolé, c'est fermé"
Pauvres de nous, à Sainte-Hélène comme partout dans le Royaume-Uni, nous sommes victimes de la tradition ....
Notre désillusion avalée, pour ne pas dire bue, nous partons à la rencontre de nos souvenirs historiques, le domaine de Longwood et le tombeau de l'Empereur, qui se résument désormais aux 5 photos que j'ai prises ce jour là ...
La réception officielle restera le fait marquant de cette escale. Pour en saisir tout le cocasse , il faut savoir que :
- Les habitants de l'île (environ 5000 personnes) sont des Européens descendants de Britanniques, des Africains descendants d'esclaves et des Chinois. Tous les habitants parlent anglais ; il n'y a jamais eu de créoles et les populations d'origine non britannique ont perdu la langue de leurs ancêtres.
- on ne capte pas la télevision, il n'y a aucune piste d'atterrissage, la côte la plus proche est celle de l'extrême-nord-ouest de la Namibie à 1 856 km à l'est et qu'au sud-ouest, la ville brésilienne de Recife est à 3 286 km!!
- les mariages consanguins successif dus à cet extrême isolement laissent des traces héréditaires indélébiles...
et cerise sur le gateau, on ne peut gagner le bord que par bateau ...
Ce soir le spectacle commence à 21h précise lorsque la première chaloupe se range au pied de la coupée :
Par respect du protocole c'est l'épouse du gouverneur qui va d'abord débarquer, personne n'en croit ses yeux c'est une Lady du 19eme siècle qui s'avance corsetée et robe de soirée avec crinoline !!! Après un instant de stupeur, le commandant et les officiers se reprennent pour accueillir dignement leurs hôtes. Du côté des nombreux midships "de service" (ils seront les cavaliers des demoiselles invitées) c'est la panique qui se lit sur les visages : habitués aux minettes du "Conti" à Brest ou aux "debs" lors d'autres escales, ils vont devoir partager la soirée de lady's...Comme le whisky, hors d'âge" !!!
Les arrivées se succèdent, on se croirait presque revenu à l'ère Napoléonienne ! Une exception notoire à ce défilé rétro, la tenue "moderne" du seul français présent en permanence sur l'île, Gilbert Martineau, Consul honoraire de France.
Les distractions étant rares à Sainte -Hélène, les cocktails mondains de cette importance encore plus, l'alcool va couler à flot,entres valses, quadrilles et autres dansesaussi adaptées et ce jusqu'à l'heure du retour.
Pressentant la catastrophe le Commandant donne l'ordre au capitaine d'armes de mettre en place une équipe de plongeurs au pied de la coupée et une autre au ponton de débarquement sur l'île...
Accoudé aux passavent avec quelques copains, nous allons vivre des moments inoubliables.
Ayant perdu toute dignité dans un excès de champagne et de whisky, les ladie's titubantes, empétrées dans leurs tenues surannées réalisent des prouesses d'équilibre pour descendre la coupée qui pour elles s'est transformée en un véritable tobogan !!!Ce sont des rires histériques et des gloussements qui accompagnent chaque embardéesi bien que nous n'entendons aucun "choking" même lorsque le tact et la retenue de rigueur envers ces notables font défaut aux marins de service dont les bras secourables évitent aux rombières de tomber à l'eau au grand soulagement des plongeurs parés à intervenir.
La traversée et courte, les chaloupes tanguent et roulent sous les mouvements incontrolés des iliens et iliennes toujours hilares si bien que le débarquement et lui aussi épique !! Cette réception mémorable pimente notre brève escale de deux jours.
Nous sommes à nouveau en mer, cap sur le Brésil.

Santos (6/12/1967 - 12/12/1967)

Pourquoi faire escale à Santos plutot que rallier directement Rio ? Il est des décisions qui resteront a jamais des mystères... Toujours est-il que ce premier contact avec le Brésil est plutôt chaleureux , il suffit de regarder la foule qui se presse pour visiter le bord pour s'en rendre compte.
La visite du bord est pour l'équipage , ce que le cocktail est pour le midships , à savoir une occasion de "draguer" rapidement et efficacement, la réussite de ce plan étant prélude à une escale réussie !
Pour mon ami Guy et moi, l'affaire se présente bien, c'est donc à quatre que nous allons entamer l'aventure Brésilienne.
Nous avons vite fait le tour de la ville alors nos charmantes amies nous proposent de découvrir en avant première Rio de Janeiro d'autant, me dis-je que l'on pourrait attendre la Jeanne là- bas c'est sa prochaine destination ...A peine émise cette proposition se heurte à la dure réalité : il ya 500 km à parcourir, nous n'avons pas de voiture, notre permission se termine le 12 à minuit et manquer un appareillage à l'étranger, c'est le rapatriement immédiat plus les sanctions disciplinaires...
Finalement, Santos c'est pas mal, Rio attendra demain ...

Rio de Janeiro (13/12/1967 - 14/12/1967)

Enfin, je vais découvrir le stade Maracana, un rêve de gosse fan de foot ! Hé oui, pour moi Rio c'est celà !!! et qui plus est, je vais pouvoir assister à un match opposant Botafogo au Santos FC de Pelé..Jamais je n'aurais pu imaginer que je vivrai ça un jour ...
Inutile de vous préciser que la baie de Rio, la plage de Copacabana, le pain de sucre et le Corcovado (désignation courante de la grande Statue - d'une hauteur de 38 m -) du Christ Rédempteur dominant la ville du haut du mont du Corcovado)ne sont qu'anecdotes même si ce sont les seules photos qui me restent... Que ce soit à Santos ou a Rio, j'ai fait la découverte de la misére sud américaine, mais que ce soit lors de la traversée des favellas de Rio ou dans les rues de Santos, je n'ai eu à me garder des mendiants de toutes sortes , je n'ai vu que sourire et détermination. Quelle différence avec l'Afrique que que nous avons quitté récement.
Hé oui, c'est la sonnerie qui envoie l'equipage au poste de manoeuvre... Adieu Brésil, nous voguons vers de nouvelles découvertes...

le passage de la ligne (17/12/1967)

Cette "cérémonie", est une distraction jouissive , non répétitive (une par campagne), pour tous ... A l'exception notoire des néophytes !!!
A bord de la Jeanne d’Arc, la fête du franchissement de l’équateur est l’occasion de briser la hiérarchie habituelle le temps d’une journée ; ce ne sont plus les galons qui s’imposent, mais plutôt l’expérience de chacun en matière de navigation.
En cette année 1967, la présence à bord d'un VIP , mais au demeurant néophyte, a bousculé la tradition : C'est seulement lors du deuxième franchissement de l'équateur en remontant les côtes de Brésil vers Trinidad que nous allons célébrer le passage de la ligne alors que nous aurions dû le faire lors de notre taversée entre Abidjan et Sainte-Hélène...Décidement cet homme a le bras long et joui de beaucoup d'égards !
Il faut dire que cette journée laisse un souvenir impérissable à tous les néophytes! « La cérémonie du passage de la ligne est un événement profondément ancré dans les traditions de la marine »
presque aussi profondément que peut l’être la convocation dans l’anus du facteur.
Cette dernière phrase peut paraître vulgaire, c’est cependant la première épreuve qui attend le néophyte. Je vais vous ce que j'ai vécu : A la veille de la cérémonie, (le 17 /11/1967) "le facteur" fait le tour de l'ensemble des postes pour que chaque néophyte recoive sa convocation pour la cérémonie du lendemain...
Ladite convocation est glissée entre les fesses du facteur, des fesses qui auront été au préalable enduites et ré-enduites de produits gras dont les dates de consommation ont été largement dépassées. Il arrive parfois (mais de façon régulière) que la convocation soit fausse, d’où un deuxième passage obligé pour le malheureux néo à farfouiller dans le postérieur du facteur pour récupérer du bout des dents le précieux billet... Je fais donc partie de ces plusieurs centaines de néophytes de tous grades et milieux n’ayant pas encore eu l’honneur de « passer la ligne » sur un bâtiment de la marine.
Afin de célébrer l’événement, le bord est exempt de toute activité opérationnelle et invité à prendre part à la fête du passage de la ligne. Il s’agit d’intégrer les néophytes dans le cercle très envié des chevaliers (qui ont déjà franchi l’équateur) et des dignitaires (qui l’ont franchie au moins deux fois).
Costumés et grimés, les néophytes suivent pendant quelques heures un véritable parcours initiatique inscrit dans les traditions de la marine nationale : on ne franchit pas impunément les limites du domaine de Neptune ! Accompagné de sa compagne Amphitrite, du commandant et des dignitaires participant à la cérémonie – pilote, astronome, évêque, juges et greffier –, le dieu des mers préside à la cérémonie du passage de la ligne. Au cours de celle-ci, chaque néophyte comparaît devant le tribunal équatorial et franchit divers ateliers à thème pour enfin terminer dans la piscine installée pour l’occasion sur le pont d’envol.
Humour bon enfant(?),le doute est permis!!! ce qui est sûr, c'est qu'on assiste le temps d'un après - midi à un renversement des rôles et à des barbouillages en tous genres sous un soleil équatorial toujours au rendez-vous.
Signalons au passage que les douches et lavabos du bord sont condamnés jusqu'à 17h30 environ ce jour là !!!

Kourou - Ile du Diable (20/12/1967 - 22/12/1967)

Trève de fariboles nautiques, revenons aux choses sérieuses : l'escale, objet de ces lignes, à un caractère très particulier à mes yeux pour deux raisons,
la première demeure à ce jour inexpliquée: si vous cherchez cette escale sur des sites officiels, vous ne la trouverez pas! Pourquoi, je n'ensais rien...
la seconde est plus pragmatique : c'est la découverte du CSG (Centre Spatial Guyanais ) qui n'est pas encore opérationnel : il sera inauguré par le lancement de la fusée-sonde “Véronique” le 9 avril 1968.
C'est donc un chantier que vont visisiter ceux qui auront l'autorisation de se rendre à terre (chance que je n'aurai pas!).
Si j'associe Kourou et l'ile du diable, c'est tout simplement parce que nous étions au mouillage vers l'ile du diable le port de Kourou encore en construction ne pouvant accueillir un batiment de notre taille !!! Le fait marquant de cet escale, est météorologique: c'est la que j'ai fait connaissance avec le climat de type équatorial humide caractérisé par un taux d'humidité qui descend rarement en dessous de 80 % avec des t° comprises entre 22 °C et 32 °C (en moyenne).
Pour la première, et unique fois, où j'ai eu l'impression de ne pas pouvoir respirer !!! nous essuyons en permanence de courtes pluies torrentielles chaudes !!! et ces averses sont suivies d'une chaleur torride. Affreux...
Je viens de comprendre que c'est de manière délibérée qu'ont été deportés ici les prisonniers, essentiellement politiques, génants sachant que leur espérance de vie, dans ces conditions, était d'environ 5 ans ... Le bagne sera définitivement fermé en 1946. Ces iles sont aujourd'hui des lieux d'excursions ouverts au public !!!
c'est sans regret que je vois s'éloigner cet endroit inhospitalier...On va retrouver vie à Trinidad..

Port of Spain (26/12/1967 - 2/01/1968)

Dakar, Abidjan, Rio, Santos… des destinations qu’aujourd’hui, cinquante ans après les faits tout le monde, ou presque, sait situer.En ce qui concerne Ste Hélène, les connaisseurs sont moins nombreux alors quand je vous dis Trinidad et Tobago, là c’est le trou noir pour la grande majorité d’entre nous.
Je dis, nous, car avant cette fin d’année 2017, j’aurais été bien incapable de vous situer ces deux iles de la mer des caraïbes.
C’est à Port d’Espagne, que nous accostons en ce 26 décembre 1967. Un aperçu géoraphico-politico-historique ne vous fera pas de mal alors allons-y. Port-d'Espagne, aussi appelée Port of Spain en anglais, est la capitale de Trinité-et-Tobago Trinidad and Tobago pour les puristes. La ville est localisée sur le golfe de Paria, sur l'île de Trinité. C'est le principal centre d'activité des Caraïbes. Trinité-et-Tobago, en forme longue la république de Trinité-et-Tobago, en anglais : Republic of Trinidad and Tobago, est un État insulaire des Caraïbes au large du Venezuela. Indépendant depuis 1962 Membre du Commonwealth, la langue officielle du pays est l’anglais; le créole trinidadien, à base lexicale française est en déclin. Sa capitale est Port-d'Espagne. Trinité-et-Tobago est composée de deux îles distantes de 35 km l'une de l'autre : Trinité et Tobago dont Scarborough est le chef-lieu.
C’est en ce lieu paradisiaque que je vais vivre mon premier réveillon de la St Sylvestre ! Au son du calypso(18) donné par les steel bands(19), et de la soca, plus énergique, particulièrement plébiscitée par les jeunes. Un style band est un orchestre de steel pan(20)…Cette musique et ces instruments sont encore inconnus en Europe qui va les découvrir avec la musique jamaïcaine des rastas…Cette escale est une fête permanente avec le rhum qui coule a flots et les danseuses qui improvisent au rythme du calypso… Un petit pincement au cœur au moment du départ, que la Colombie toute proche va vite nous faire oublier.

Carthagène (05/01/1968- 08/01/1968)

Pour moi, tout aurait pu basculer lors de cette escale,le destin en a décidé autrement.
Si je ne vous l’ai déjà dit, sachez que je possède aussi un assez joli « coup de crayon » et un bon talent de copiste. C’est important pour la suite des événements.
Il y a 4 mois environ, un révolutionnaire, Ernesto « Che » Guevara est exécuté en Bolivie… Il se trouve que j'ai, dans mes affaires personnelles, une photo du Che que je vais reproduire à l’encre de chine pour mes copains… Nous avons 20 ans , la révolte, la révolution même si nous sommes militaires, ça ne nous laisse pas indifférents…
Mais avec quelle inconscience , pour quels motifs suis-je en train de distribuer une vingtaine de ces portraits, moi Uncle, en uniforme de la Royale sur une place de marché en Bolivie ? Je vous le demande. Telle une trainée de poudre, la nouvelle se répand : un marin Français en uniforme distribue des dessins du Che !
Je ne comprends pas pourquoi d’un coup une dizaine d’individus me saisissent par un bras m’entrainent en courant pendant que derrière nous une foule assez importante empêche la police de nous poursuivre. Au bout d’une dizaine de minutes de course, je me retrouve attablé dans un bar ave 3 ou quatre personnes les autres ont disparu. Dans un mélange d’anglais, d’espagnol et de français, ils entreprennent de me faire comprendre ce à quoi je viens d’échapper : une arrestation par la police bolivienne. C’est à ce moment que je réalise l’ampleur de ma c……erie ! Imaginez le scandale international que j’ai failli provoquer : distribuer le portrait d’un révolutionnaire fraichement exécuté après avoir fait trembler plusieurs états d’Amérique latine, dont la Colombie, en uniforme de la marine Française.
Je suis mal, très mal car il faut que je regagne le bord. Ce sont mes « sauveurs » qui vont trouver la solution : il me font prendre une cuite assez sévère et me ramènent titubant vers le port jusqu’au moment où nous trouvons un petit groupe de permissionnaires rentrant de goguette, Ils me confient à eux. Quelques instants plus tard, c’est un groupe de joyeux matafs qui passe l’obstacle d’un cordon de police, et retrouve un peu de dignité pour franchir la coupée puis disparaitre dans les coursives. Je suis sauvé, l’affaire est close mais pour moi l’escale est terminée.
Il semblerait que les autorités locales aient protesté auprès de l’état-major, mais n’ayant ni coupable ni preuves à fournir l’incident fut classé sans suite, personne ne l’a jamais évoqué, mais très rapidement, ceux à qui j’avais donné ce dessin l’ont rangé à l’abri des regards indiscrets, j’ai fait de même avec la photo d’origine … qui réapparaitra quelques années plus tard.

Cristobal (09/01/1968- 10/01/1968)

Un nom qui ne vous dit rien je pense, mais si j’ajoute, port de l’atlantique donnant accès au canal de Panama là, je vois que vous situez la chose. Cristobal est le port de la ville de Colon qui n’a vraiment rien de pittoresque. Le seul intérêt de cet arrêt à l’entrée la zone du Canal(21) (Canal Zone).c’est la possibilité d’accéder aux magasins « PX»(22) normalement réservés aux seuls GI’s et à leurs familles.
Pourquoi un tel engouement pour des magasins militaires ? tout simplement parce qu’ils débordent de matériel HI-Fi , d’appareils photographiques, de caméras etc… made in Japan détaxés, une aubaines pour des marins qui découvrent le monde. Mes centres d’intérêt n’étant ni le cinéma, ni la photo, encore moins la musique, je reste à bord. Quelques temps plus tard un copain me revendra un 24x36, non reflex, avec lequel je vais faire une petite centaine de diapos durant les 6 ans de ma vie maritime ! Aussi alors que mes petits camarades mitraillent à tout va tout au long des 77 km du canal, vais-je me contenter de regarder encore et encore, l’esprit déjà tout à notre prochaine destination : Tahiti que nous atteindrons après 14 jours de mer.

Papeete (24/01/1968 - 30/01/1968) & (08/02/1968 - 09/02/1968)

J’y suis, dans quelques heures je vais fouler le sol de Tahiti un nom chargé d'exotisme qui est je crois pour beaucoup dans mon choix de cette vie de marin. Ce nom m’a fait rêver bien plus que ceux d’archipel polynésien ou de Polynésie française des cours de géographie.
Lentement nous approchons du quai. Déjà j’entends les to'ere, des cylindres de bois creux frappés à l'aide de baguettes, et les tambours pahu. C’est à leur rythme que les danseuses et danseurs de tamouré vont tout au long de notre manœuvre d’amarrage exécuter le «Ori Tahiti» une danse traditionnelle en costumes végétaux, ’ahu more plus communément appelé more, des jupes en fibres végétales, et des couronnes. Les hommes (tane) sont torse nu, les vahinés portent des soutiens gorge en noix de coco. Tous ont un collier de fleurs de tiaré et chaque marin va se voir, dès qu’il descendra à terre, remettre un collier de tiaré ou une fleur qui se place derrière l’oreille comme le veut la tradition.
Cette escale je la vis en version 100% touriste : tour de l’île en taxi découverte de sites merveilleux, la pointe Vénus et les plages de sable noir, le Trou du souffleur. Mais surtout une visite au musée Gauguin et la découverte d’une étrange sculpture : un Tiki. Ce tiki qui est partout et que je vais acheter aussitôt… Un retour à bord pour déposer nos achats un brin de toilette et c’est le retour en ville, nous allons découvrir Papeete by night.
Aucune hésitation sur notre destination, il est incontournable, il y a de l’ambiance, des tahitiennes : c’est au Quinn’s que nous allons nous éclater. Ouah, c’est chaud tous les permissionnaires de la Jeanne sont là, les serveuses, que l’on appelle les «Quinn’seuses » ou moins gentiment les «pouffiasses » presque débordées sont tout sourire ! nous savons, acquis d’anciens que ce sont des filles très sympathiques, qui, lorsqu’elles ont jeté leur dévolu sur vous, vous étreignent très fort et rapidement pratiquent une forte aspiration associée de mordillements vifs à la base du cou : le non moins célèbre « suçon du Quinn’s » qui laisse évidemment des traces et virent au fil des jours en passant par toutes les couleurs de l’arc-en-ciel.
Après moult Hinano ou Manuia, ces bières locales est sont ici de vrais best-seller, c’est le passage obligé aux toilettes, un lieu pour ainsi dire infâme, même pour un marin je me dis que ça doit faire partie du folklore ! Retour à bord au petit matin quelques heures de sommeil et on attaque une journée de travail. Ce soir si je ne suis pas de quart, on y retourne avant de terminer au Lafayette le second haut lieu des bringues tahitiennes, notamment de minuit à l’aube après l’heure de fermeture du Quinn’s et des boites de Papeete.
Quelle escale ! Dans quelques heures Nous serons à :

Bora-Bora (31/01/1968 - 07/02/1968)

Plus encore que le nom de Tahiti Bora-Bora avait fait naitre en moi le rêve polynésien. Celui de la douceur de vivre, de l'indolence , bref un remake du paradis terrestre. Je n'ai pas été déçu, la réalité de cette île est vraiment à la hauteur de ce que j'ai imaginé. Chez les danseurs et danseuses qui nous accueillent il n'y a aucune arrière pensée touristique, juste l'envie d'accueillir des hôtes.
Mais même au paradis vous pouvez rencontrer quelques désagréments, à preuve :
Les taches du bord terminées, c'est quartier libre pour la journée.
je passe par le quai de Vaitape. pour m'arrêter quelques instants sur la tombe d'un de mes héros Alain Gerbault

San Francisco (21/02/1968 - 28/02/1968)

Atoll de Clipperton (05/03/1968 - 05/03/1968)







Acapulco (08/03/1968 - 13/03/1968)

Balboa (18/03/1968 - 20/03/1968)

Cristobal (20/03/1968 - 21/03/1968)

Basse-Terre (25/03/1968 - 27/03/1968)

les Saintes (27/03/1968- 28/03/1968)

Fort de France (29/03/1968 - 04/04/1968)

New York (10/04/1968 - 18/04/1968)

Lisbonne (29/04/1968 - 04/05/1968)

Venise (10/05/1968 - 17/05/1968)

Tunis (20/05/1968 - 23/05/1968)

BREST 31/05/1968 - 22/11/1968

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